lundi 14 mars 2011

SOUTENANCE MÉMOIRE #1

Emilie Blondeau : De plis en replis, variations inspirées de Borges et de Bertin
Préparation de la soutenance du mémoire
15 mars 2011

En guise d’introduction, je souhaite vous préciser que dans un premier temps je vais vous présenter ma recherche et comment je les articule et dans un deuxième temps je vais vous exposer mes recherches actuelles et leurs états prospectifs.

CONTEXTE :
Depuis l’année dernière, je consacre mon travail à la réflexion sur la visualisation des données et leur restitution par des moyens graphiques, ainsi qu’au domaine de l’édition. À ce titre le pop-up et le dépliant ont été des supports privilégiés.
À travers mes différentes expérimentations, je me suis peu à peu intéressée à la cartographie, au design d’information, à la signalétique et à l’art numérique, notamment avec l’artiste John Maeda, un des pionniers dans ce domaine et qui a été une référence importante pour moi. Il a mis au point une méthode d’apprentissage de la programmation nommée design by numbers qui est le titre d’un de ses livres ; deux de ses anciens étudiants, Benjamin Fry et Casey Reas, ont poursuivi dans cette direction pour réaliser Processing, un environnement de design interactif très prometteur, basé sur la plate-forme Java.
Aujourd’hui, de l’espace du livre au volume, je suis toujours dans un travail qui associe le design d’espace au graphisme.

SUJET ET GRANDES LIGNES DU SUJET
Ces différents centres d’intérêts m’ont permis de mettre en place un projet de recherche pour mon diplôme pour lequel j’ai choisi de travailler sur la visualisation de données spatiales et sensibles du territoire, et plus précisément sur la cartographie de la ville d’Orléans.
La ville est un espace vecteur de nombreuses informations et de flux en lien avec des données sonores, temporelles et spatiales et dans laquelle chaque espace vécu est unique. Elle est le territoire de notre quotidien et en cela elle devient le support de notre fiction : c’est là que l’on vit, que l’on dort, que l’on rêve...

Mon questionnement alors a été de me demander comment la carte pourrait devenir “objet” d’une nouvelle lecture de la ville.
En effet nos trajets, les expériences que nous menons à travers nos différentes déambulations sont autant d’histoires qui s’inscrivent sur un territoire commun et partagé. Mon intention a été de rendre compte de ces expériences multiples au sein d’une même cartographie, qui se donnerait comme un livre combinatoire, un objet de mémoire dans lequel s’inscrit l’histoire vivante de la ville.

Il faut bien différencier l’espace conçu de l’espace vécu ; c’est à cela que j’ai consacré la première étape de ma recherche, soutenue par une succession d’expérimentations en atelier et sur le terrain. En effet, par définition la cartographie donne à voir l’agencement spatial du territoire. En ayant recours au design interactif et au concept de design ouvert, j’ai compris que je pouvais aller vers de nouvelles investigations, notamment dans une traduction plus personnelle de la ville dans laquelle on vit. L’utilisateur potentiel de la carte telle que je commence à l’envisager devient donc un partenaire et cela crée une véritable opportunité d’échange et d’enrichissement, retrouvant par la même le principe que décrit Umberto Eco dans son ouvrage “l’œuvre ouverte” publié pour la première fois en 1962. L’œuvre ouverte est une invitation à faire l’œuvre avec l’auteur : citation de Pareyson “L'œuvre d'art est une forme, c'est-à-dire un mouvement arrivé à sa conclusion : en quelque sorte un infini contenu dans le fini. Sa totalité résulte de sa conclusion et doit donc être considérée non comme la fermeture d'une réalité statique et immobile, mais comme l'ouverture d'un infini qui s'est rassemblé dans une forme.”

Les cartes interactives existent déjà sous forme d’écran tactile ou sur le web. Ce qui m’importe dorénavant et qui constitue la deuxième étape de mon projet, c’est sa dimension en tant qu'objet. Comme avec la manipulation d’un globe, je souhaite retrouver une dimension tactile et aussi la capacité de pouvoir tourner autour, comme on le ferait à travers une ville. C’est à cette étape que l’analogie entre la carte et le territoire, notamment dans ma référence principale à Borges, prend tout son sens. Le rapport entre 2D et 3D est un enjeu difficile à résoudre, que je conçois comme la création d’un “patron” et sa réalisation ou sa mise en volume. Ma problématique sera donc de donner forme à un graphique, de visualiser un ensemble de données par une approche en volume et de comprendre comment cela en modifie la lecture.
Cette recherche rejoint le travail de Pierre Vanni, graphiste toulousain. Formé aux nouvelles technologies, il cherche à travers ces expérimentations plastiques et ces projets professionnels à réinvestir autrement les technologies de l’image de synthèse, notamment en conjuguant une phase de conception numérique avec des moyens de mise en œuvre fragiles, voire dérisoires, comme le papier ou le carton. Ce travail autour de l’image de synthèse s’inscrit dans l’évolution du design graphique et son orientation tactile.

Cette nouvelle cartographie qui émerge de mon travail se donne alors comme un objet de mémoire collective pour et par les habitants.
Derrière l’utilisation du papier, l’enjeu est d’élaborer une nouvelle proximité entre l’homme et ses supports de communication, une nouvelle interactivité destinée à opérer un graphisme plus sensible.

CONCLUSION // FORME MÉMOIRE & OUVERTURE
Pour mon mémoire, j’ai choisi une forme évoquant tout à la fois l’objet livre et l’objet cartographique : le livre étant le support de la fiction, du texte et le dépliant cartographique faisant référence à l’information, aux repères iconographiques et bibliographiques.

Depuis l’écriture de ce mémoire, mon travail tend vers une recherche plus fantasmatique et rejoint l’idée d’une ville virtuelle. Si la ville est le lieu où l’on vit notre quotidien, je la considère également comme un point de départ aux rêveries et à l’imagination et j’en fais un espace où tout peut devenir possible, même les choses les plus irrationnelles. Elle ouvre sur une nouvelle appréhension du réel, nourrie par la mouvance du design interactif et par l’étude des flux dans lesquels les frontières spatiales s’effacent pour créer un espace infini. Progressivement j’évolue vers un travail de déformation de l’espace qui génère de nouvelles formes graphiques et plastiques, pour créer un nouveau regard sur la ville, permettant alors de la redécouvrir sous différents angles comme une vue kaléidoscopique, un jeu de facettes et de fragmentations. Le kaléidoscope est un objet qui m’intéresse de plus en plus dans la formalisation de ces expériences dans ses facultés de dédoublements et de multiplications à l’infini d’un même motif.
Au bout du compte, c’est la ville dans tout ce qu’elle a de mouvant, de caché, de secret, qui m’intéresse.

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